L’œuvre augmentée – entre passé et futur. Histoire de l’art, Sémiotique et Humanités numériques (APPEL A CANDIDATURE pour Winter School).
PROJET. À l’ère de l’image digitale, l’ordinateur nous offre toujours plus d’images reproduites et mises en réseaux, notamment par l’intelligence artificielle, alors que les médias portables encourageant à leur manipulation sans limites. En même temps, notre époque semble animée par l’exigence de renouveler son rapport aux œuvres d’art selon des formes d’appropriation à la fois plus démocratiques et personnalisées, à l’encontre d’une tradition interprétative considérée comme trop élitiste. Dès lors, l’étude de l’art ne doit-elle pas se relancer à partir de telles tendances : non pas les subir ou les épouser, mais y voir l’occasion d’autant de problématisations précieuses ? C’est en ce sens qu’on proposera de s’attaquer à ce qu’on appelle l’œuvre augmentée. Cette winter school veut offrir par là une occasion de repenser l’œuvre d’art à l’ère du numérique : entre histoire de l’art et sémiotique de l’image artistique, mais aussi entre pratiques d’exposition et modes de visualisation inédits, dans le développement d’une Digital Art History.
Pour commencer, il faudra réinterroger la présence de l’image artistique, qui n’est pas une évidence, ainsi que sa mise en scène, puisque l’œuvre est plus que jamais exposée, reproduite et associée à d’autres images. Focalisée sur la peinture du XVe au XIXe siècles, l’école posera alors au départ une question déjà ancienne : que faut-il voir dans une œuvre d’art pour mieux la comprendre ? Comment faire face à sa singularité ? Comment analyser la manière dont elle réinterroge son environnement culturel ? Or, si l’œuvre est une évidence paradoxale, car difficile et jamais acquise, c’est parce qu’elle consiste en l’ensemble de ce qu’elle peut faire voir, de ce qu’elle a pu faire voir et de ce qu’elle fera voir. Dans sa présence et son mode d’exposition, l’œuvre n’a jamais été isolée. C’est pourquoi elle a toujours été en un sens augmentée. Il s’agira dès lors de conjuguer une reconstruction des expériences des observateurs avec une réouverture de l’œuvre, grâce à une multiplication des cadres herméneutiques. Pour éviter que l’œuvre ne soit ramenée à une archive de données, son passé sera mis en relation avec son futur, sa philologie avec sa puissance de dialogue avec d’autres œuvres.
Mais il importera également de concevoir une pédagogie active et critique des médias numériques, qui permettent d’analyser et générer des bases de données très importantes d’une part, et de travailler sur les œuvres autrement d’autre part. Les médias aujourd’hui augmentent l’œuvre d’art à nouveaux frais. Et ils n’entraînent pas forcément un oubli de la matérialité : au contraire, ils peuvent permettre de maîtriser les couches d’organisation inhérentes à l’œuvre, y compris les traces des altérations subies, et les modes de ses expositions, les liens de l’œuvre avec d’autres objets, passés ou possibles.
D’où un projet cohérent d’augmentation de l’œuvre d’art in situ, que l’école proposera dans une double perspective : archéologique, qui restitue le tissu de relations constitutives de l’œuvre dans le temps ; critique, qui offre un espace imposant l’œuvre comme une puissance d’organisation de notre regard. L’œuvre sera éclairée par la proximité d’autres œuvres ou objets, sur place ou sur écran ; et elle sera analysée par la stratification des gestes de son instauration et sa transmission, matérielles et culturelles. L’objet d’art sera ainsi redéfini en lui-même – en sa poétique, son esthétique – comme en ses tensions avec des dimensions plus vastes – sociales, historiques, technologiques – concernant l’œuvre, l’image, la vision plus en général. Finalement, cette école sera l’occasion d’un effort conjoint de l’histoire de l’art et de la sémiotique visuelle pour faire des analyses de corpus profitant des avancées des nouvelles technologies qui produisent des connaissances.
À cet effet, l’école sera axée sur des ateliers expérimentaux en présence d’œuvres exposées. L’objectif sera de décrire et d’expliquer les images par d’autres images, en les regroupant par familles et en les connectant dans des rhizomes. La priorité sera donnée au montage et au démontage visuel des images, en réduisant autant que possible sa présentation verbale. Ces activités, encadrées par des conférences épistémologiques et animées par des discussions méthodologiques, seront placées entièrement sous le signe de l’entraînement à l’analyse et de la confrontation, collective et plurielle.
ÉQUIPE. Ateliers de méthodologie pour l’étude des œuvres d’art : Ralph Dekoninck, Bertrand Prévost et Sophie Raux (histoire et théorie de l’art) ; Pierluigi Basso, Angela Mengoni et Gian Maria Tore (sémiotique des arts et des médias) ; Mathias Blanc, Floor Koeleman et Federico Nurra (art et humanités numériques), entre autres. Expertise en traitement de la matière picturale et digitale : Alberto Sangalli (restauration), Serge Miguet et Mihaela Scuturici (intelligence artificielle), Lars Wieneke (design numérique), entre autres.
CALENDRIER PREVISIONNEL.
15/1/24 à l’Academia Belgica. 13h30-18h Présentation du projet de recherche Augmented Artwork Analysis et de la winter school, organisation des travaux. 18h-19h30 Conférence publique de Bertrand Prévost (spécialiste en histoire et théorie de l’art, Université Bordeaux-Montaigne) : « Augmenter les images »
16/1/24 à la Villa Medici. 9h-18 Cours et ateliers, avec visite de la Villa et échange avec ses résidents. 18h-19h30 Conférence publique de Federico Nurra (Chef du Service numérique de la recherche à l’Institut National d’Histoire de l’Art, Paris) : « Numérique en histoire de l’art ou histoire de l’art en numérique ? »
17 et 18/1/24 à l’Academia Belgica. 9h-12h30 Cours de méthodologie en histoire de l’art, sémiotique et humanités numériques. 14h-17h30 Ateliers expérimentaux in situ par équipes. 17h30-19h Mise en commun des travaux d’équipes, avec experts en traitement de la matière.
19/1/24 dans les lieux d’exposition des œuvres étudiées. 9h-17h30 Présentation et discussions des résultats des ateliers de la winter school.
ADMISSION. Est admise toute personne spécialisée dans le domaine de l’art : étudiantes et étudiants en doctorat, chercheurs et chercheuses, professionnelles et professionnels. Niveau requis : master. Modalités : envoi d’une lettre de motivation et d’un CV pour le 15/10/2023 ; notification des candidatures retenues le 20/10 ; frais d’admission à régler pour le 15/11 : 350 € (incl. 3 déjeuners). Possibilité de logement à prix préférentiel.
Informations et envois des candidatures : <pierluigi.bassouniv-lyon2.fr> et <gian-maria.toreuni.lu>
Réalisé dans le cadre du projet de recherche Augmented Artwork Analysis (AAA) de l’Agence Nationale de la Recherche en France (ANR) & du Fonds National de la Recherche au Luxembourg (FNR), Université de Lyon 2/ENS de Lyon & Université du Luxembourg, avec l’Université Catholique de Louvain et l’Université de Liège.
Quellennachweis:
ANN: Winter school: L’œuvre augmentée – entre passé et futur (Rome, 15-19 Jan 24). In: ArtHist.net, 19.09.2023. Letzter Zugriff 03.11.2024. <https://arthist.net/archive/40119>.