CFP 06.02.2020

Espace art actuel, no. 126: Laboratoires/Laboratories

Montréal (Canada)
Eingabeschluss : 02.03.2020
espaceartactuel.com/en/call/

André-Louis Paré

ESPACE art actuel, no. 126 (Septembre/September 2020): Laboratoires/Laboratories

[English version below]

Incarnant d’entrée de jeu l’univers de la recherche scientifique, la notion de laboratoire comporte des déclinaisons plurielles, lesquelles se révèlent particulièrement fécondes dans le monde de l’art. Déjà, en 1939, le premier directeur du MoMA, Alfred Barr, invite à considérer la jeune institution comme un laboratoire, un lieu d’expérimentations conviant le public à une participation active. Depuis, cette attention pour la dimension expérimentale au sein des musées s’est accrue, apparaissant notamment sous forme de divers « laboratoires » à visée éducative, ou s’associant à de réels laboratoires de recherche en arts visuels. Au-delà des musées, cette propension exploratoire se manifeste bien entendu à même l’atelier de l’artiste. L’histoire de l’art est éclairante à cet égard : l’atelier comme lieu d’investigations techniques, matérielles et conceptuelles nous permet de remonter bien en amont du 20e siècle, comme en témoignent des figures aussi éloquentes que De Vinci, alliant les interventions artistiques et scientifiques, ou Vermeer maniant les pigments avec la précision d’un chimiste.

Si l’atelier de l’artiste demeure au fil des siècles un lieu d’essais et d’erreurs, certaines pratiques contemporaines témoignent de démarches processuelles dont les œuvres sont plus fortement tributaires. On pense ici à des œuvres manifestant de manière palpable l’expérimentation de nouvelles technologies ou de procédés scientifiques, défiant au détour les codes et vocabulaires de leur médiums. Relevant d’une temporalité qui se déploie dans la durée, elles intègrent des stratégies de collecte, d’échantillonnage, d’analyse, de validation et d’itérations variées. Parallèlement, il importe de considérer le laboratoire comme sujet à part entière. Allant de représentations les plus réalistes aux plus métaphoriques, l’imaginaire des laboratoires – avec ses forts ancrages historiques – alimente les pratiques actuelles et engage de nouvelles avenues dans les relations entre art et science.

D’autres phénomènes sont à considérer du côté de la production. Bien que la collaboration étroite entre des artistes et des scientifiques (ou des techniciens spécialisés) rejoint le caractère fréquemment interdisciplinaire des laboratoires, la présence grandissante des groupes de recherche ou de collectifs de chercheurs au sein des programmations d’expositions ou de manifestations artistiques offre d’autres pistes de réflexion. Dans certains cas, la recherche conjointe de différents spécialistes permet d’injecter dans un cadre artistique des approches épistémologiques variées, ou encore de mettre à nue des réalités sociales, politique et économiques relevant de rapports de pouvoir épineux. Lorsque ces approches collaboratives articulent la recherche à l’investigation dans une optique d’enquête et de dévoilement, elles inscrivent l’agentivité, entendue comme capacité d’initier et de diriger des actions transformatrices, comme principe agissant du laboratoire.

Dans cette optique, les matériaux et outillages classiques de l’expérimentation scientifique laissent de plus en plus place à un data varié, provenant des systèmes de communication, de banques de données statistiques ou visuelles, de collecte de terrain, pour n’en nommer que quelques occurrences, faisant ainsi écho à la théorie de l’acteur-réseau, suivant laquelle toute entité, humaine ou non-humaine (objets, discours, corporations, etc.) est constituante de la société et permet d’en élucider les contours. De là, s’impose l’idée de la société comme laboratoire, appelant des formes d’expérimentations artistique à-même l’espace citoyen, urbain ou virtuel. Dans cette optique, il semble aussi pertinent d’observer de plus près l’actualisation des stratégies artistiques visant échapper à l’institution pour agir directement dans l’arène sociale. Suivant cette idée, le principe du laboratoire peut se transposer du côté de la réception, en particulier lorsque les artistes entendent déstabiliser ou renverser les modalités de perception, ou du moins penser le public comme une variable libre, une donnée aléatoire avec lequel conjuguer.

Arrive enfin le laboratoire scientifique comme tel. L’étude des modalités cognitives de la création artistique ou de l’expérience esthétique est en train de forger de nouveaux champs de savoir en extension à la psychologie de la perception. Ainsi apparaissent des chercheurs spécialisés, notamment en neuroesthétique, une discipline émergente employant les outils et les paradigmes des neurosciences pour élucider nos réponses psychologiques à l’art. Si ces recherches ont leurs limites méthodologiques, surtout quand vient le temps de circonscrire ce que l’on entend par art dans un laboratoire médical, les développements qui s’y opèrent sont non seulement digne d’intérêt, mais ils nous informent en retour sur la pertinence de garder le contact entre la recherche en arts visuels et la recherche scientifique.

Partant de ces considérations, ce dossier de la revue ESPACE vise à regrouper des textes mettant de l’avant des pratiques actuelles qui sondent et mobilisent le potentiel sémantique et pratique des laboratoires. Si vous souhaitez participer à ce dossier, nous vous invitons, dans un premier temps, à contacter avant le 2 mars 2020 la direction de la revue par courriel (alpareespaceartactuel.com) afin de présenter sommairement votre proposition. Très rapidement, nous vous informerons si votre proposition est retenue. Votre texte, version complète, ne devrait pas dépasser les 2000 mots, notes incluses et nous sera remis pour le 4 mai 2020. Le cachet est de 65 $ par feuillet de 250 mots.

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[English version]

An emblematic feature of the scientific research world, the notion of the laboratory comprises a wealth of variations, which prove to be particularly fruitful when transposed into the art world. Already in 1939, the first director of the MoMA, Alfred Barr, suggested that the young institution be viewed as a laboratory, a place for experimentation in which the public is invited to actively participate. Since then, this interest in the experimental dimension within the museum has grown, notably appearing under the guise of various "laboratories" with an educational aim, or through an association with actual research laboratories in the visual arts. Beyond museums, this exploratory disposition is, of course, expressed directly in the artist studio. Art history is very revealing in this regard: the studio as a site for technical, material and conceptual explorations goes back to well before the 20th century, as is borne out by exemplary figures such De Vinci, who combined artistic and scientific interventions, or Vermeer, who handled pigments with the precision of a chemist.

While the artist studio continues to be a space for trial and error over the centuries, some contemporary practices testify to process-based approaches that have a more direct impact on the resulting works. For instance, works that tangibly make use of new technologies or scientific processes and concurrently challenge the codes and lexicons of their mediums. Based on a temporality that unfolds in duration, they combine various collection, sampling, analysis, validation and iteration strategies. At the same time, it is important to not lose sight of the laboratory as a subject in its own right. Ranging from highly realistic representations to highly metaphorical ones, the laboratory imaginary — with its deep historical roots — fosters current practices and opens new avenues for the arts and science relationship.

On the production side, other phenomena are worth considering. Though the close collaboration between artists and scientists (or specialized technicians) echoes the often interdisciplinary character of laboratory work, the growing presence of research groups or researcher collectives in exhibition programs or major arts events provides other lines of approach. In some cases, the joint research of various specialists makes it possible to introduce a variety of epistemological approaches into an artistic framework, or to lay bare social, political and economic realities that are based on thorny power relations. When these collaborative approaches connect the research with an investigation in a discovery driven inquiry perspective, they inscribe agency, understood as the capacity to initiate and guide transformative actions, as the laboratory's operative principle.

In this perspective, the classical materials and tools of scientific experimentation are increasingly making way for diverse data, derived from communication systems, statistical or visual databanks, field data, to name but these incidences, thus echoing the actor-network theory according to which every entity, human or non-human (objects, discourses, corporations, etc.) constructs society and makes it possible to elucidate its contours. Hence, the idea of society as a laboratory that directly calls forth forms of artistic experimentation in urban or virtual citizen space. In this regard, it is also pertinent to take a closer look at the renewal of artistic strategies that seek to escape the institution in order to act directly in the social arena where they are being carried out. In following this idea, the principle of the laboratory can be transposed to the reception side, in particular when artists set out to destabilize or overthrow perceptual modes, or at least to think of viewers as a free variable, a random datum to be worked with.

Finally, there is the scientific laboratory itself. The study of the cognitive modes involved in artistic creation or aesthetic experience is fostering new fields of knowledge in extension to the psychology of perception. This has led to the emergence of specialized researchers, notably in neuroaesthetics, a nascent discipline that uses the tools and paradigms of the neurosciences to elucidate our psychological responses to art. While this research has its methodological limits, especially when it comes to defining what one understands by art in a medical laboratory, the developments that are taking place there are not only worthy of interest, they also provide feedback on the pertinence of encouraging contact between visual arts research and scientific research.

With these ideas as a departure point, this feature section of ESPACE magazine seeks to gather texts that foreground current practices and which sound out and mobilize the semantic and practical potential of laboratories. If you would like to submit an article, we invite you, as a first step, to email the magazine’s editor André-Louis Paré before March 2, 2020 at alpare[]espaceartactuel[.]com and present a summary of your proposal. We will inform you promptly if your proposal is accepted. Your completed text should not exceed 2000 words, footnotes included, and must be received by May 4, 2020. The honorarium is $65 per page of 250 words.

Quellennachweis:
CFP: Espace art actuel, no. 126: Laboratoires/Laboratories. In: ArtHist.net, 06.02.2020. Letzter Zugriff 26.04.2024. <https://arthist.net/archive/22573>.

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